La réduction des dépense publiques est devenu un objectif collectif incontournable. Annoncé par chaque gouvernement, il n’a jamais fait l’objet de décisions permettant de l’atteindre et surtout d’un véritable projet d’évolution attractif.

Il est vrai que dans l’imaginaire collectif, je ne suis pas sûre que chacun se pose la question du coût du service public. Comme si le mot « public » était incompatible avec le mot « coût » !! L’expression « service public » recouvre une nébuleuse à laquelle le contribuable considère qu’il a droit coûte que coûte….sans réfléchir que plus c’est cher et plus cela lui coûte à lui. Il devrait être aussi exigeant sur la qualité et le coût comme qu’il l’est pour tout achat.

Si l’on veut sortir de la spirale des coupes brutales dans les budgets de fonctionnement, la seule solution est de ré-interroger ces fonctionnements, de les faire évoluer en intégrant les nouvelles technologies, en progressant en compétences et en favorisant les fluidités et les mobilités. En investissant dans le social et l’humain.

Bref, c’est un projet à part entière, conduit par une main de fer dans un gant de velours, pour des années et des années.

Manager les services de l’Etat

Dans le cadre de ma responsabilité antérieure dans l’énergie, j’ai fréquenté longtemps et souvent les nombreux services de l’Etat des différents ministères auxquels ce secteur d’activité a des comptes à rendre. Ils sont nombreux ! Entre les services et les directions en charge d’élaborer les décrets et les réglementations, de veiller à leur mise en oeuvre et (éventuellement d’en contrôler la pertinence ?), l’incohérence et les écarts n’ont fait que s’accroître au fil des années. Par manque de management global et de partage du sens des lois votées.

A cela s’est ajouté un éloignement de plus en plus marqué entre les services et les cabinets ministériels, ces derniers se dotant de jeunes conseillers de plus en plus nombreux, peu aguerris aux sujets sur lesquels ils étaient sollicités et évitant de prendre l’avis des services par peur de perdre la face et de ne pas savoir gérer des points de vue différents.

Ainsi au moment du projet de loi sur la transition énergétique en 2014, j’étais alors rapporteur au titre du CESE sur ce projet de loi. Le texte prévoyait la création d’un nombre infini d’instances de concertation, de travail, de programmation etc …sans jamais proposer la suppression des instances existantes. Effet « mille feuille ». Lorsque j’ai interrogé un jeune conseiller sur ce point, il a ouvert de grands yeux, comme s’il ne comprenait pas « ce détail »…. pour lui, ce genre de question n’avait pas d’intérêt. Ce n’était pas sa priorité, ni celle de sa ministre. La question du coût et de l’impact des mesures préconisées dans ce projet de loi, n’avait pas d’intérêt pour eux. Toute expression sur ce sujet était rejetée comme étant un signe d’opposition au projet. Incroyable ! Il est vrai que ce ne sont pas des mesures vendeuses, et pourtant elles sont courageuses et importantes pour ceux qui au quotidien subissent ces instances pléthoriques et inefficaces.

Comment les politiques de tout bord ont-ils pu en arriver à cet aveuglement alors qu’ils perdaient mois après mois depuis des générations toute crédibilité, puisqu’ils prenaient des mesures de court terme, sans souci de leur impact et de leur pertinence, et s’entouraient d’armées  de conseillers en tout genre, faisant doublons avec des équipes existantes.  Cela ne pouvait pas bien se finir. Nous n’en avons aujourd’hui plus les moyens.

Priorisation et cohérence pour l’efficacité à terme

La décision du Président Macron, de diminuer les effectifs des cabinets de chaque ministre et de favoriser la transversalité et les interactions entre eux, constitue une réelle avancée. Elle traduit concrètement sa volonté dans sa propre organisation et celle de son équipe.

http://www.lemonde.fr/gouvernement-philippe/article/2017/05/19/emmanuel-macron-limite-par-decret-le-nombre-de-collaborateurs-des-ministres_5130146_5129180.html

Combien de décisions peut-on prendre et suivre pour qu’elles soient réellement mises en oeuvre et apportent les résultats recherchés ? assez peu en fait de mémoire de dirigeante. Et encore moins, si la cohérence et la priorisation ne sont pas assurées, avec un partage sans faille du sens et du projet auquel elles sont censées contribuer. De tout temps, c’est la réalité. Transition numérique ou pas. L’accélération que celle-ci provoque, pourrait conduire à l’inverse de ce que nous en attendons si nous ne sommes pas capables de nous alléger de tout ce qui nous alourdit. Le risque est d’être de fait emportés dans le vortex de cette transformation. « Les chiens maigres courant plus vite » avait coutume de dire Pierre Delaporte, président d’EDF.

Alors le 21 août 2017,  le Monde a sorti un article titré « la machine gouvernementale au bord du burn-out ». Le quotidien suit le sujet ! enfin à sa façon. Il n’a jamais proposé une analyse qui permette de comprendre la situation, ni le sens des mesures prises par le nouveau président de la République. Il conclut quelques semaines après la décision, à sa façon. Il ne se pose pas la question de la  remise en question inéluctable des modes de fonctionnement et des processus dans ces lieux de la haute administration publique. Aussi haute soit-elle, la chute sera plus dure si elle ne prend pas la main sur son devenir. Si elle n’est pas force proposition pour aller vers des fonctionnements plus fluides, en interaction avec les autres services. Se remettre en question, construire un projet et manager ….. aussi pour susciter la confiance de leurs interlocuteurs des cabinets des ministres.

Arrêter  de dire « non » et agir

Dénoncer les coupes dans les budgets est une réaction de peur qui n’assure pas du tout du retrait de la décision, mais plutôt de sa mise en place brutale et aveugle, car nécessité fait loi. Si Les Français deviennent exigeants sur la qualité et l’efficience (y compris économique) de leurs services publics…. nous pourrons ralentir  le gaspillage.

Si les professions protégées remettent en question d’elles-mêmes certains fonctionnements pour anticiper et prévenir les attentes des clients, si les services publics proposent des allègements et des dispositions pour simplifier et éviter les réglementations inapplicables et coûteuses pour l’entreprise.

Si chacun se demande quel est le sens de ce qu’il fait pour.

Si chacun décide d’agir dans son métier et dans sa responsabilité plutôt que de subir….. une force de changement se mettra en place bien plus efficace que toute insoumission.