J’adore le poivre. J’en ajoute systématiquement avant même d’avoir goûté. Du poivre en grains noir et parfois rouge (le plus rare dit-on) d’origine choisie. Du poivre dans un moulin. Mes amis m’offrent du poivre, des moulins à poivre anciens ou pas. Jusqu’à hier, je ne me posais pas de question. C’était ainsi.
Jusqu’à ce que mes yeux découvrent le nom de cette petite rue de Quimper, en plein centre. « Banell ar PEBR » en breton, c’est-à-dire « Venelle du poivre ». J’hallucine car je vois mon nom de famille abrégé. PEBR……c’est PEBRO…c’est PEBEREAU…Moi qui croyais que ce nom était d’origine espagnole ou portugaise. Erreur, il se peut donc qu’il soit breton ! Après une rapide enquête c’est même du vieux breton, et plus loin encore du vieux latin. Bon alors tout se tient.
Je réalise que mon choix de faire des études de latin et de grec, n’était pas le geste de révolte que j’avais cru courageusement poser contre mon père qui me voyait polytechnicienne au minimum. Non il s’agit d’une vocation ancestrale, de l’expression d’un attachement familial à cette origine hors du temps.
Je comprends mieux pourquoi mes roues depuis près de 40 ans m’amènent systématiquement en Bretagne, dans le Finistère. Mon amie bretonne n’a finalement pas eu beaucoup à me convaincre en 1978 pour venir chez elle à Beg-Meil. J’étais pré-programmée. Voilà donc pourquoi c’est ici que je viens quand j’ai une peine, une joie, une envie d’air …c’est ici que je viens me ressourcer. Abandonnant à la mer et aux odeurs de varech mes humeurs et mes pensées parfois sombres.
Tout est clair. Il n’y a pas de hasard comme le dit un de mes bons copains. Plus besoin d’aller chez un psy pour m’en sortir. Tout cela n’est qu’une histoire de poivre. D’épice, de piquant …..atchoum ! Mais non le poivre ne me fait pas éternuer. C’est bien la confirmation que j’ai le poivre dans le sang !
Donc finalement nous sommes bretons. Finies les mauvaises plaisanteries. Mes ancêtres sont bretons du plus loin qu’ils remontent.
Cette attirance folle pour le poivre n’est donc pas une affaire de goût.
Plus grave…c’est une affaire de famille.